Sainte Marie-Madeleine

Sainte Marie MadeleineJamais aucun saint n’aura fait l’objet de tant d’attention … et de détournements. Depuis 1914, sainte Marie-Madeleine a été officiellement constituée patronne céleste de notre diocèse de Fréjus-Toulon. Et elle peut le prétendre ! En effet son culte est bien étayé à Saint-Maximin dont la basilique recèle le tombeau et les reliques, à quelques kilomètres du site magnifique de la Sainte-Baume (la «Sainte-Grotte ») où la tradition fixe les dernières années de sa vie. Le « GEOPS » (laboratoire GEOsciences de Paris-Saclay), sous l’autorité du CNRS vient de publier en juin un rapport de prospections géophysiques analysant le sous-sol de la basilique de Saint-Maximin, qui suggère un ensemble cultuel paléochrétien d’importance qui fera probablement l’objet de fouilles archéologiques dans les années à venir. Quoi qu’il en soit le culte de l’« Apôtre des apôtres » y est attesté bien avant la découverte du sarcophage, en 1279.

 

Membre de l’aristocratie juive hellénisante, de l’entourage d’Hérode (Lc VIII 1-3), Marie de Magdala est qualifiée de « pécheresse » : non pas la prostituée qu’imaginera sa légende mais faisant partie de ces gens « centrés sur eux-mêmes » que dénonce saint Paul dans la deuxième lecture de sa fête, ce qui n’exclut pas une morale relâchée. Il y a bien des manières de pécher ! « Saturé de platonisme, son univers intellectuel, dit le dictionnaire Jésus de l’Ecole biblique de Jérusalem, croyait à une forme de rédemption par la beauté et le culte des valeurs aristocratiques. » Peut-être fut-elle ébranlée par le témoignage du martyre de Jean-Baptiste dont elle a pu être témoin. La première manifestation de sa conversion sera l’onction chez Simon le Pharisien où elle vient s’humilier aux pieds de Jésus pour les baigner de parfum, reconnaissant en lui le Grand prêtre dont la fonction sera de remettre les péchés. Jésus l’accueille ainsi : « Elle a répandu le parfum sur mes pieds. A cause de cela, ses péchés, ses nombreux péchés lui sont remis parce qu’elle a beaucoup aimé, puis il dit à la femme : ‘tes péchés sont remis’. » (Lc VII 46-48). Elle ne cessera désormais d’accompagner et de soutenir de ses deniers Jésus dans sa vie publique. Avec Marthe, sa sœur et son frère Lazare, elle lui offre aussi régulièrement dans sa maison le havre de paix dont il a besoin avec ses apôtres. Alors que s’approche l’heure de la Passion, elle réitérera le geste de l’onction avec un parfum de grand prix, allant jusqu’à essuyer de ses cheveux les pieds du Seigneur. « Partout où sera proclamé l’Evangile, au monde entier, on redira à sa mémoire ce qu’elle vient d’accomplir » dit alors Jésus. Il ne s’agit donc pas d’un geste anodin. Il est encore rendu plus mystérieux quand le Christ, voyant le flacon brisé à ses pieds et le nard totalement répandu prononce cet ordre : «Qu’elle garde ce parfum pour le jour de ma sépulture. » 

Fidèle jusqu’au pied de la Croix, elle se précipite au tombeau au matin de Pâques : le seul parfum qu’elle y apporte est celui qu’exhalent encore ses cheveux, mais dans un autre ordre c’est bien la bonne odeur de la foi qui lui fait découvrir la présence du Ressuscité dans le jardin qui devient le nouvel Eden de nouveau accessible à une humanité recrée. La porte qu’Eve avait fermée est désormais ouverte. A l’énoncé de son nom : « Marie ! » elle reconnaît le Seigneur, mais il ne s’agit plus alors de parfum ou de prosternements : « Ne me touche pas ! ». Les sens de la foi sont désormais sollicités et c’est sur ce chemin-là qu’elle reçoit la mission de porter l’annonce de la Résurrection aux apôtres eux-mêmes ! Parfaite figure du disciple dans la foi, elle est la première à avoir respiré l’enivrante odeur de la Résurrection. Aujourd’hui encore à la Sainte-Baume, de la chapelle du Saint-Pilon à la crypte de la basilique de Saint-Maximin, elle la diffuse et sollicite nos sens pour qu’ils s’ouvrent à la grâce.