SurrexitSurrexit Dominus vere, alleluia !

« – Le Christ est ressuscité ! – Il est vraiment ressuscité ! »

Comment résonnera-t-elle, cette réplique au cœur des slaves qui dès le jour de Pâques ne se salueront pas avec notre banal « – Bonjour ! –Bonjour ! », mais avec cette étonnante profession de foi ?

Peut-être avec plus de ferveur encore, quand la mort n’est plus une simple hypothèse lointaine mais quand elle est là avec toute son horreur.

Nous qui faisons un pas de côté dès que le voisin se met à tousser, nous qui ne nous serrons presque plus les mains pour préserver une santé que nous voudrions inaltérable, nous qui ne veillons plus les morts mais veillons bien à les faire disparaître le plus hygiéniquement possible, nous devons intégrer dans notre logiciel que la mort, que la violence aussi, que le Mal est là, tapi à notre porte et qu’à vues humaines il aura toujours le dernier mot. C’est notre horizon, c’est l’horizon que l’homme s’est choisi pour garder l’illusion d’être libre, libre d’aimer ou de haïr, libre de donner la vie ou de tuer, libre de se reconnaître fils de Dieu ou de le renier.

Qu’on le veuille ou non, malgré tous nos efforts, l’homme est mortel, les civilisations le sont aussi : nous l’avons appris désormais, écrivait Paul Valéry entre les deux guerres mondiales. Nos grands idéaux et nos prétendues valeurs, également…

Voilà quelle était notre destinée jusqu’à ce que Dieu la reprenne en main lui-même en payant le prix fort : celui de l’Incarnation dont la logique va jusqu’à la Croix. Ce jour-là, l’humanité a accepté dans le « Oui » du Fils éternel, de faire retour au Père, de dire « Oui » à la vraie Vie. Et voilà qu’éclate en la nuit de Pâques l’hymne triomphale de la victoire : « Le Christ est ressuscité ! », qui est notre victoire. Le Christ est ressuscité pour être le premier ressuscité.

Désormais chacune de nos vies a un avenir, chacun de nos efforts et tout ce que nous élaborons dans le sens du projet de Dieu, rien n’est perdu : tout prend sens et porte fruit.

L’évènement de Pâques a bouleversé l’histoire du monde et demeure le pôle de son calendrier ; le jour du soleil est devenu pour nous le jour du Seigneur : dies Dominicus. Il est jusqu’aux Emirats Arabes qui viennent tout juste de le reconnaître – pour des raisons évidemment économiques – comme jour férié…

Depuis ce jour plus rien ne sera comme avant.

Et pourtant, il nous semble que tout continue comme avant…

Car nos vues sont courtes et nous avons le nez sur l’événement. La liturgie de la Vigile pascale embrasse la vaste histoire du monde depuis la Genèse et le moment de la Création, elle égrène les siècles, les infidélités de l’homme et les promesses de salut, jusqu’à ce petit matin lumineux où la lueur de l’aurore dispute encore sa part aux ténèbres : où la foi des femmes rencontre l’incrédulité des apôtres jugeant leurs propos délirants.

Jusqu’au terme de l’histoire, la fulgurante lumière de la Résurrection buttera contre l’obscure résistance de l’homme. Dans son infinie délicatesse et son respect pour nous, le Seigneur ne cesse de l’offrir avec la discrétion des premiers rayons du jour, mais nous savons que rien n’arrêtera leur course.

Le Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité !  Laissons-nous envahir par sa joie !